Depuis le 2 août dernier, nous vivons à crédit! Vous savez, c’est le fameux jour du dépassement de la terre, de plus en plus tôt chaque année. À cette date, on a déjà émis plus de CO2 que ce que les océans et forêts peuvent absorber. On a déjà consommé plus de ressources que ce que la planète peut renouveler . Il faudrait 1,7 planètes pour subvenir à nos besoins (plus de 5 si tous les humains vivaient comme des australiens). Attardons nous sur notre consommation d’électricité.
En France métropolitaine, la production d’électricité a quasiment quadruplé entre 1970 et 2010*. Selon Thibaut Bouffet, conseiller Info Energie du CAUE de Nîmes, une famille de 4 personnes peut consommer jusqu’à 20 000 kilowattheures (kWh) si leur maison de 100m2 est mal isolée et qu’ils se chauffent avec des panneaux rayonnants. D’après ma facture EDF, cette année j’ai consommé 6531kWh d’électricité pour 930€. Pour mieux comprendre, je m’intéresse à ce que je consomme sous la douche. Si j’y reste 5 minutes, j’utilise environ 80L. Pour chauffer cette eau, il faut 4kWh, soit 1460 kWh, 220€ à l’année (kWh coûte 0,15€). Un cinquième de ma facture!
Nos besoins énergétiques vont bien au-delà de l’électricité que nous utilisons chez nous, la partie cachée de l’iceberg est plus impressionnante. Mes recherches ont été fastidieuses, la thématique énergétique étant d’une grande complexité. Il est difficile de se focaliser sur l’électricité quand nous utilisons aussi gaz, pétrole, charbon… Dans Presque tout sur l’énergie, Jacques Deferne explique que « Pour notre confort, nous consommons, toutes énergies confondues (chauffage, transport, énergie grise), environ 100kWh par jour. Il ne nous resterait que 60 ans de réserve de pétrole, 57 ans de gaz et 147 ans de charbon !»
La France, miss monde du nucléaire
En France, environ 77% de l’électricité provient des centrales nucléaires, une énergie « verte » a- t-on cru pendant des années. C’est vrai que le nucléaire n’émet pas de C02 directement lors de son fonctionnement (6g de CO2/kWh rejetés dans l’atmosphère, idem pour l’hydraulique, 55g pour le photovoltaïque, et 1060g pour l’électricité fossile), mais on ne peut pas dire pour autant que c’est une énergie verte. Toute la chaine en amont est énergivore et alourdit le bilan carbone du nucléaire. Fabrication des matériaux de construction, transport, démantèlement, la facture est lourde.
Déchets nucléaires, un cauchemar dans notre placard!
Si une centrale produit des déchets classiques (bois, métaux, plastiques…), les déchets radioactifs posent un problème colossal auquel personne ne trouve de solutions acceptable. Le point de vue de Greenpeace est clair : « Extraction et enrichissement de l’uranium, combustion, retraitement pour faire du plutonium: toutes ces opérations entraînent des déchets. Des centaines de milliers de tonnes depuis le lancement de l’industrie nucléaire! Une partie de ces déchets est hautement radioactive pendant des dizaines, voire des centaines de milliers d’années, et personne ne sait quoi en faire. Des décennies de recherches et d’investissements colossaux n’ont pas fourni de solution. En clair, les déchets s’accumulent, faisant peser une menace de plus en plus grande sur l’environnement et les générations futures. Il est temps de sortir de cette impasse, et la meilleure façon de gérer en toute sécurité ces déchets, c’est de ne pas en produire!». Aujourd’hui, 20 000 tonnes d’uranium inutilisé ont été amassées en France!**
Un bel héritage pour les générations à venir. La députée Barbara Romagnan résume très bien la situation : « Les démantèlements en cours ont amené leur lot de mauvaises surprises : presque un demi-siècle de travail et un coût multiplié par 20 pour Brennilis (…) De fait, même si nous gérons raisonnablement le démantèlement des installations nucléaires et rendons aux générations futures des sites décontaminés et sans servitudes, la question du stockage des déchets fait que celles-ci auront à gérer, parfois pendant des milliers d’années, les déchets produits pendant 50 ou 70 ans d’industrie nucléaire (…)
Or si l’on prend le cas de Cigéo, le centre de stockage des déchets nucléaires en couches géologiques profondes situé à Bure, nous concevons une solution irréversible qui ne tient pas compte des progrès éventuels à venir. Nous condamnons de fait ceux qui nous succèderont à entretenir – en faisant le pari que des structures sociales subsisteront à l’échelle de milliers d’années – un héritage que nous aurons rendu définitif »***
Une prise de risque folle
Quant aux accidents nucléaires, un Tchernobyl ou un Fukushima ne pardonne pas. Dans le documentaire Uranium, si puissant et si dangereux ? de Wain Fimeri, il est expliqué que le réacteur N°4, qui a explosé le 26 avril 1986 à Tchernobyl, n’aura perdu que la moitié de sa radioactivité lorsque le soleil engloutira la terre d’ici 4 ou 5 milliards d’années! Outre les dégâts sanitaires et écologiques, le coût financier d’un accident est énorme, 170 milliards d’euros pour Fukushima, le double de l’estimation des autorités japonaises****
Un coût global plus du tout compétitif
Si on prend en compte tout ces facteurs, est-on toujours d’accord pour payer ce que propose le nucléaire? Et même en ne regardant que notre portefeuille, sa compétitivité semble fondre comme neige au soleil. Nous avons désormais du recul sur les factures réelles de démantèlements en cours. « Le verdict de la Cour des comptes est sans appel concernant l’EPR et confirme ce que dit Greenpeace depuis des années : le mégawattheure produit par Flamanville coûtera entre 70 et 90 euros, soit aussi cher que l’éolien terrestre», tranche Sophia Majnoni, en charge de la campagne Nucléaire chez Greenpeace France.
Et pour le photovoltaïque?
Pour Thibaud du CAUE, les panneaux photovoltaïques représentent une réelle opportunité pour le mix énergétique future de la France, comme le conseille le scénario NégaWatt sur la transition énergétique d’ici 2050: « Il est possible de couvrir la totalité des besoins énergétiques de la France par des sources renouvelables à l’horizon 2050. La biomasse solide reste la première source de production d’énergie renouvelable, suivi de très près par l’éolien puis le photovoltaïque ».
Technologies, gestion des déchets, coût…
Plus heureux avec le photovoltaïque !
Un panneau est composé de cellules de silicium (deuxième élément le plus abondant sur terre et principal composant du sable) chargées en électrons qui réagissent au rayonnement du soleil en se mettant en mouvement, ce mouvement crée de l’énergie que nous transformons en électricité. Thibaut du CAUE m’apprend que 94% d’un panneau est recyclable (verre, aluminium…), ne laissant que 6% de déchets, lesquels seront enfouis ou brulés comme la plupart de nos ordures. Ce n’est pas anodin mais c’est un bilan bien plus honorable que le nucléaire. Dans le sud de la France, le coût minimum de production est évalué à 66 € par mégawattheure et pourrait atteindre 50 euros en 2025*****.
De nombreux chercheurs se creusent les méninges pour répondre à ce casse tête et les progrès sont prometteurs. Selon une étude de l’Imperial College London, les performances de l’énergie solaire ont doublé entre 2009 et 2016, principalement grâce à la réduction de consommation d’énergie dans la fabrication du silicium. Aujourd’hui, 15 m2 de panneaux permettent de produire au mieux 4500 kWh, leur durée de vie est entre 25 et 50 ans et le retour sur investissement se situe vers la dixième année. Le photovoltaïque ne peut pas encore, à lui seul, répondre à nos besoins énergétiques, mais si c’était le cas, il ne faudrait que la moitié de la superficie du Gard pour subvenir aux besoin de la France entière! L’équipe du professeur Nir Tessler de l’ Institut de Technologie d’Israël a fait une découverte de géant en matière de photovoltaïque organique en doublant leur efficacité d’une traite. Ces panneaux ne sont pas composés de silicium mais de carbone et ressemblent à des intercalaires en plastique, fins et souples. Cette avancée permet d’envisager leur apparition sur le marché dans les prochaines années. « Les cellules organiques apparaissent porteuses d’espoir dans le sens où elles transforment non seulement l’énergie du soleil en électricité, mais elles sont, en plus, de simples molécules vivantes, donc naturelles, avec un caractère écologique important », publie le site mrmondialisation.org en 2016.
Alors, ne soyons pas résignés, des solutions peuvent se mettre en place pour limiter les dégâts de ces dernières décennies. Nous devons prendre conscience que chaque geste compte et que nos responsabilités pourront s’exprimer à de nombreux niveaux, qu’ils soient politiques, dans notre consommation ou dans nos habitudes de tous les jours. Je vais d’ailleurs penser à mettre un pommeau de douche écologique, permettant de diviser par 2 ma consommation d’eau pour me laver…
Julie Claverie
Un grand merci à Laura Brunel
*https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr
**http://www.nucleaire-nonmerci.net
****http://energie-developpement.blogspot.fr
*****www.environnement-magazine.fr
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