Alter’éco30 à Vauvert, éco-lieu inspirant l’autonomie !

C’est en 1997 que Bruno et sa compagne, Anne, s’installent sur la commune de Vauvert avec un projet d’élevage d’escargots. De fil en aiguille, ils ont investi leurs deux hectares de terrain autour d’un projet global qui montre qu’un modèle de vie plus autonome en local est possible. Ce lieu de vie alternatif s’est construit progressivement autour des besoins naturels de leur famille : manger sain, se loger, accompagner leurs enfants sur les chemins de la vie, échanger et partager.

En arrivant sur place, je croise plusieurs personnes, l’un s’occupe du potager, l’autre répare un vélo, une jeune maman récupère son enfant après un atelier Montessori… tous me saluent d’un large sourire. Bruno m’accueille avec un thé au saveurs orientales. C’est un homme discret et calme. La douceur qui émane de lui est accompagnée d’intentions rayonnantes : expérimenter, diffuser et transmettre.

Leur potager

S’il commence avec un élevage d’escargots qu’il complète avec des volailles en 2000, il souhaite plus d’autonomie et de qualité pour l’alimentation des siens. Anne et lui se familiarisent avec l’agroécologie et investissent petit à petit leur terre. Ils plantent des variétés anciennes d’arbres fruitiers, des arbustes et des lianes, en parallèle de leur potager. Aujourd’hui, ils ont plus de 240 variétés dans leur verger, nommé le « Jardin de la vallée verte ». Ils choisissent des plantes et arbres résilients qui ont peu de besoins en eau et en soin. Dès la première année, ils pèsent tout pour vérifier leur intuition de bons rendements. Et ils ont bien raison ! Ils produisent, en bio, 4 kg de pommes de terre au mètre carré alors qu’en conventionnel, les rendements n’atteignent que 2,5 kg ! En saison, le verger couvre les besoins des résidents et woofers, soit une dizaine de personnes en moyenne. Ils déshydratent les fruits et légumes ou en font des conserves pour l’hiver.

Écoconstruction et économie d’énergie

La maison a été construite dans les années 60 et, dès leur emménagement il y a plus de 20 ans, Bruno réfléchit à un moyen d’avoir chaud en hiver sans occasionner un bilan énergétique trop lourd. Ses études scientifiques lui écolieu vauvertpermettent de penser et concevoir des solutions naturelles, peu coûteuses et au plus près de ses besoins. Il se demande quel matériau a un grand pouvoir isolant, est disponible à proximité sans être valorisé ? La laine de mouton ! Il en trouve en Lozère, auprès d’éleveurs qui la considèrent comme un déchet. Quelques travaux plus tard, il réduit sa consommation de bois de 30 à 8 stères par an.

Puis, il se penche sur la cuisson des aliments. « Nous sommes dans le sud de la France, comment notre ensoleillement jalousé pourrait-il nous aider ? ». Bruno sort ses compas, fait des recherches et conçoit un cuiseur solaire en forme de parabole. Équivalant à une plaque de gaz de restaurateur, il faut compter environ 200 € d’investissement, quelques heures de bricolage et les outils d’un petit atelier. Ce cuiseur est maintenant une référence locale en la matière. Pour l’avenir, Bruno souhaite développer un système de phytoépuration ; une citerne de récupération de pluie et un séchoir solaire pour déshydrater les aliments. Le mot d’ordre : réutilisation de l’énergie (temps, argent, travail…) en choisissant le bon processus.

Éducation et partage de connaissances

La transmission et le partage de connaissances a toujours été l’un des ciments du projet. Alter’éco30 accueille des visites de différentes structures dont le CAUE (Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement), le CIVAM (Centre d’initiatives pour valoriser la culture et le milieu rural) ou d’autres administrations attentives à l’enjeu écologique. Les Petits Débrouillards, une association d’éducation par la science, y anime régulièrement des ateliers. Et surtout, Bruno et ses amis mettent à disposition sur leur site web des manuels complets sur différents sujets (énergie, écoconstruction…). « Parfois, nous faisons le choix de moins produire, nous achetons notre riz, par exemple. Cela peut sembler contradictoire avec notre projet d’autonomie. Mais nous choisissons de conserver du temps pour écrire nos manuels et les diffuser. C’est un moyen d’aller vers une autonomie plus globale », m’explique Bruno. Le lieu accueille aussi des ateliers selon la pédagogie Montessori, pour transmettre aux enfants autre façon de penser dès le plus jeune âge. Plusieurs familles y participent. Pendant les vacances, Anne propose des formations adultes à cette pédagogie. Beaucoup d’instituteurs de l’Éducation nationale s’y intéressent.

Changer nos croyances pour avancer

Nous sommes souvent enfermés dans des systèmes de pensée, persuadés que c’est comme ça, qu’on ne peut pas faire autrement ! Ces mécanismes poussent au fatalisme, à la résignation. Personne ne change rien, nous sommes tous confortés dans nos croyances, enlisés dans l’inertie, dans la peur de l’inconnu et du jugement des autres si on fait différemment. Bruno et les personnes qui l’ont rejoint veulent remettre ces façons de fonctionner en question. « Nous avons souvent été dans le doute et la peur au démarrage d’un projet, me dit Bruno, mais au fur et à mesure, on se rend compte qu’on peut faire autrement, et ce, dans tous les domaines de la vie. Nous en faisons le constat tous les jours ici, un changement en entraîne un autre ! ».

Vingt-et-un ans après le démarrage, Bruno est dans la joie et l’espérance. L’éco-lieu répond aux enjeux actuels et ouvre le champ des possibles en montrant l’exemple. Réparer soi-même, maîtriser la fabrication et la culture, limiter l’utilisation des ressources fossiles, apprendre à être plus responsable… Alter’éco 30 prouve que c’est possible !

Julie Claverie

www.altereco30.fr