Kokopelli, gardien de graines

Pour être commercialisables, les semences doivent rentrer dans un cadre légal complexe, alors que pendant des millénaires, leur reproduction était libre et gratuite. Kokopelli fait face à cette aberration. Un objectif simple : libérer les semences et préserver la biodiversité.

kokopelli

C’est dans l’abbaye de Cendras, lors d’un concert classique, que je rencontre Jocelyn, membre co-fondateur de Kokopelli. Le stand est coloré de centaines de petits sachets de graines et de livres sur la permaculture et l’autonomie. Pendant l’interview, il vérifie que je suis bien attentive en m’appelant « grande sœur ». Dans les années 80, la rencontre avec Dominique Guillet dessine le projet Terre de Semences qui commercialise semences bio, reproductibles et libres pour les particuliers, mais l’activité est jugée illégale et la SARL est dissoute. En 1999 la même équipe lance l’association Kokopelli à Alès. À l’époque, il y peu de conscience de la graine « mais celui qui contrôle la graine contrôle tout ! » insiste Jocelyn. Au début du siècle, les lois sur le brevetage du vivant s’intensifient. En 1941 est créé l’ordre des semenciers, et le Catalogue répertoriant les semences commercialisables. Inscrire une semence à ce catalogue coûte aujourd’hui environ 8 000 € et les normes à respecter sont draconiennes. La majorité des agriculteurs cultivent donc des variétés hybrides, OGM et bien souvent stériles. Et Jocelyn de me rappeler « les graines ne sont pas une marchandise comme les autres ! C’est l’autonomie alimentaire qui est menacée ».

Pierre Rabhi est vice-président de l’association et au départ, les graines étaient offertes aux adhérents cotisants. Mais les fraudes interdisent aussi ce système. Concurrence déloyale ! Malgré les nombreux procès qu’elle perd un à un, l’association opte pour « l’insoumission face aux psychopathes prédateurs » et regroupe plus de 10 000 adhérents fin 2015. Fin juillet, la loi sur la biodiversité devait légaliser la commercialisation de semences non inscrites au catalogue auprès des particuliers. Le jour de l’interview, le conseil constitutionnel censure les articles sur les semences. Alors amis jardiniers, que faire ? Pour Jocelyn, ce sont les 18 millions de jardiniers du dimanche qui peuvent tout changer. C’est en Kokopellisant nos jardins que nous pourrons les soutenir. Grâce à la campagne « Semences sans Frontières », des semences fertiles sont envoyées aux paysans des pays pauvres pour les aider à recouvrer autonomie et souveraineté. Nous pouvons devenir parrain d’une graine rare, la cultiver, la récolter et la diffuser pour la protéger. L’éveil de nos consciences mènera au réveil général !

Julie Claverie

Plus d’infos sur www.kokopelli-semences.fr

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